L’histoire de l’Eglise Saint-Adrien d’Adissan
Aucun document n’éclaire les raisons et les étapes de la reconstruction de cette ancienne église placée sous le vocable de saint Adrien. Seuls les traits de son architecture, un gothique languedocien, permettent de situer la nouvelle église dans le courant du début du XIVe siècle, période d’une vaste activité architecturale qui voit également l’église de Saint-Hippolyte de Fontès sortir de terre. La construction de l’église gothique d’Adissan entre dans un vaste mouvement de modifications qui se produit à l’intérieur du village : émergence simultanée de quartiers et érection d’une enceinte. Son emplacement, situé extra-muros, souligne l’existence de barris ou de faubourgs mais aussi l’accroissement de la population. En 1848, de gros travaux modifient la physionomie architecturale de ce sanctuaire. C’est ainsi que la tour-clocher au sud de l’édifice est surélevée et percée à son sommet de quatre baies en ogives, que le mur de façade est repoussé d’environ 4 mètres, pour former une troisième travée où est dressée une tribune, et enfin, que les chapelles latérales, au nord et au sud de la seconde travée de nef, s’élèvent.
L’église d’Adissan a été en partie construite en basalte noir extrait d’une carrière des alentours. Le plan originel est d’une étonnante simplicité : une nef à deux travées d’inégales grandeurs et d’un peu moins de 10 mètres à la fois de long et de large, sans collatéraux ni chapelles à l’origine, suivie immédiatement d’une abside pentagonale plus basse et plus étroite, introduite par un petit mur diaphragme, sans oculus. Ainsi, l’unité de l’espace liturgique est mise en avant. La voûte élevée à 11 mètres au-dessus du sol s’appuie sur des murs gouttereaux ténus. Le rapport entre la largeur et la hauteur de la nef et la symbolique du chiffre trois, une abside et deux travées, mettent en évidence une volonté d’harmonie qui prime sur l’ornementation et perpétue toujours l’expérience romane.
L’abside est surmontée d’une voûte rayonnante à six nervures. Ces six branches d’ogives, simplement chanfreinées, butent sur une clef ronde ornée d’un blason qui pourrait être celui de l’évêque de Béziers, Sicard de Lautrec (1371-1383). L’arc diaphragme repose sur des culots en basalte local au décor feuillagé, caractéristique de l’art du XIVe siècle. Un décor identique se retrouve sur les culots qui soutiennent l’arc triomphal de Saint-Hyppolite de Fontès.
Les deux travées de nef sont voûtées de deux croisées d’ogives séparées par un doubleau. Exhibées à 11 mètres, les ogives se croisent sur deux clefs rondes. Celle de la première travée s’orne d’un blason qui porte en son centre un globe ; celle de la seconde se rehausse d’un soleil à six rayons. Comme dans beaucoup de petites églises, les doubleaux et les ogives, simplement chanfreinés, reposent sur des culots, fréquemment employés dans les petits édifices.
Les culots de la nef affichent des sculptures à la fois discrètes et très présentes dans cette vallée de l’Hérault. Des thèmes et des personnages réalistes se déploient dans l’édifice : bustes d’anges vêtus d’une tunique plissée, sur les deux culots de la première travée et semblant soutenir les ogives, tête coiffée d’une couronne vicomtale sur le culot central au nord et faisant le pendant à un culot trapézoïdal avec tailloir et câble torsadé (peut-être est-ce un remploi d’un chapiteau antérieur ?), tête bouclée face à une autre surmontée d’un chaperon embellissent les deux derniers culots de la nef. Les voûtes sont couvertes par une toiture à deux versants surélevée en 1848.
A l’instar des autres églises gothiques de la région, celle d’Adissan bénéficie d’un voûtement gothique qui s’appuie sur plusieurs contreforts qui jouent pleinement leur rôle de renfort. Actuellement, seulement quatre sont apparents. Deux, invisibles, sont pris dans la maçonnerie de la tour-clocher, située au sud. En outre, ceux de la porte d’entrée s’étendaient largement en avant de la façade et élargissaient les angles de ce côté de la nef. Pour imaginer l’aspect extérieur de l’église d’Adissan avant les travaux de 1848, il faut observer, par exemple, la façade de Saint-Martin de Conas.
Le chevet, rythmé à la fois par les fenêtres et par ses fins contreforts, vient se plaquer sur le mur diaphragme, peu visible de l’extérieur, qui le sépare de la nef. Mais le maître d’œuvre ne s’en est pas contenté et a introduit des moulures horizontales qui lient et mettent en valeur les différentes parties du chevet. Ce genre de décor s’observe déjà sur les églises romanes et se multiplie sur les édifices gothiques. Trois cordons horizontaux se déploient parallèlement le long du chevet. Un premier, à environ 1 mètre du sol, offre un piédestal proéminent à l’édifice religieux. Le deuxième prend la forme d’un larmier continu et court au niveau de l’appui des fenêtres, tout en soulignant le soubassement. Enfin, le dernier, placé au-dessus des fenêtres, marque extérieurement le plafond de l’abside.
La tour-clocher, située au sud, le long du premier pan de l’abside, domine la nef, le chevet, voire le village. L’observation de l’église ne révèle aucune trace d’architecture purement défensive. Ceci n’empêche pas de voir dans le clocher d’Adissan l’organe central de défense tout autant que de support des cloches et signe du lieu saint. Cette tour carrée se déploie sur deux étages, reliés par un escalier à vis, et elle comportait avant 1848 une seule baie en arc brisé, ouverte sur le couchant. Il faut attendre les travaux du milieu du XIXe siècle pour que le clocher soit exhaussé de 2,8 mètres, que la corniche actuelle avec son boudin en support le couronne, et enfin qu’il soit doté de quatre croisées, ouvertures sur les quatre points cardinaux. A cette époque, le clocheton en fer et l’horloge sont installés.
En 1848, la façade est aussi remaniée pour gagner 4 mètres dans l’église. De plus, en 1905, la devise de la république française est accolée au-dessus de la porte. A cette occasion, un certain nombre de paroissiens s’enferment dans l’église. Après une sommation d’Eugène Moulières, le maire de la commune, l’abbé Aimé Lachaud obtempère et ouvre les portes. Un inventaire est alors dressé de tous les objets qui se trouvent dans le sanctuaire.
Quelques rares textes mentionnent l’existence de chapelles dédiées à saint Marcellin et à saint Antoine qui se manifeste par autel secondaire, adossé à un simple mur. Il faudra attendre 1848 pour que les chapelles latérales soient ouvertes dans les murs gouttereaux. Une première chapelle est dédiée à saint Marcellin qui est invoqué par les Adissanais tous les 2 juin, date de sa fête, pour qu’il préserve le village des épidémies et des maladies contagieuses. Après l’interruption révolutionnaire, son culte est rétabli en 1832 tandis que la peste ravage le Nord de la France. A cette occasion, son autel est refait et richement décoré. Quelques années plus tard, en 1858, des dalles de marbre sont posées devant l’autel et, en 1880, la famille Arnaud offre un reliquaire qui renferme une relique du saint.
Une seconde chapelle dédiée à saint Antoine prend place dans l’église d’Adissan. Elle s’appuie sur le mur nord de l’édifice. Elle sera remplacée par la chapelle du rosaire avant que l’abbé Lonjon introduise la dévotion à saint Philomène en 1839.
Durant la période la plus dure de la Révolution, la célébration des offices dans l’église Saint-Adrien est temporairement arrêtée. En 1794, l’église sert d’entrepôt communal pour les cendres du marc de raisin. Il faut attendre 1804, pour que l’église soit rouverte au culte catholique.
Au XIXe siècle, le mobilier de l’église s’enrichit grâce à la dévotion d’un certain nombre de paroissiens. La pieuse famille Boussonnel fait de nombreux dons à sa paroisse et notamment en 1890 le tour de marbre de la chapelle dédiée à la Vierge ainsi que sa statue et son autel. Cette chapelle a été dernièrement restaurée par la municipalité. En 1894, Monsieur Vailhé offre la statue de Notre-Dame de Lourdes.
Les travaux d’agrandissement de l’église d’Adissan, dirigés par l’architecte biterrois Victor Chaneau, et terminés en 1848 permettent d’améliorer l’aménagement intérieur. A cette occasion, l’entrepreneur place sur le sol de la nef des pavés de terre cuite. Les marches du maître-autel sont démontées et replacées sur un lit de mortier dans les deux chapelles latérales. Deux niches y sont construites. La marche de l’appui de communion en marbre incarnat et la grille de communion en fonte de fer sont placées devant l’abside. Quatre colonnes en sapin sont dressées pour supporter la tribune, et la rampe en fer de la tribune est réinstallée. Les travaux finis, l’intérieur est blanchi.
Enfin, les archives mentionnent l’existence d’un cimetière à l’emplacement actuel du Griffe. Il faudra attendre 1806 pour qu’il soit déplacé à l’extérieur du village et le 3 décembre 1811, la nouvelle place publique d’Adissan est inaugurée par le maire du village, Denis Victor Focras de Laneuville. Depuis, le Griffe a rafraîchi des générations d’Adissanais.